samedi, décembre 17, 2005
Mona Lisa : l’énigmatique sourire percé à jour ?
Le mystérieux demi-sourire équivoque qui a intrigué les admirateurs de la Mona Lisa depuis plusieurs siècles n’est pas si ardu à interpréter, affirmaient hier des chercheurs.
Elle souriait sur la peinture parce qu’elle était heureuse, précisément à 83%, selon des experts de l’Université d’Amsterdam.
Dans ce qu’ils considèrent cependant comme une démonstration ludique de technologie plutôt qu’une expérience sérieuse, ces chercheurs ont numérisé une reproduction du chef-d’œuvre de Leonardo da Vinci et l’ont soumis à un programme ultramoderne de reconnaissance des émotions, développé en collaboration avec l’Université de l’Illinois.
Les résultats ont réparti ainsi ce que ressentait le sujet de la toile du maître : joie, 83%; dégoût, 9%; peur, 6%; colère, 2%. Moins d’un pour cent d’elle était au neutre, tandis qu’elle n’exprimait aucune surprise.
Da Vinci a commencé à peindre la toile en 1503; elle est actuellement accrochée à un mur du Louvre, à Paris.
Cette œuvre, connue aussi sous le nom de «Joconde», serait un portrait de l’épouse de Francesco del Giocondo. Le titre est un jeu de mots sur le nom du mari, signifiant également «la dame heureuse» en italien.
Harro Stokman, un professeur à l’Université d’Amsterdam qui a participé à l’expérience, a expliqué que les chercheurs étaient conscients de la nature plus ou moins scientifique des résultats, le programme n’étant pas conçu pour percevoir les émotions subtiles. Le logiciel n’a donc pu détecter quoi que ce soit de sexuel ou confirmer le mépris perçu par plusieurs dans les yeux de Mona Lisa.
Cette technologie est d’ailleurs conçue pour l’analyse de films et images numériques modernes, et les sujets analysés doivent d’abord être analysés dans un état neutre et sans émotions pour permettre au programme de détecter par la suite des émotions.
Le chercheur principal Nicu Sebe a relevé le défi avec beaucoup de sérieux, se servant des visages d’une dizaine de femmes méditerranéennes de l’époque afin de créer une image composite neutre. Il a ensuite comparé ce résultat au visage de la toile célèbre, attribuant ainsi une cote à six émotions distinctes, soit la joie, la surprise, la colère, le dégoût, la peur et la tristesse.
«Essentiellement, c’est comme appliquer une toile d’araignée sur le visage pour le fragmenter en toutes petites aires», explique Stokman. «Puis, il s’agit par exemple de détecter les infimes variations dans l’orientation des ailettes des narines ou la profondeur des rides autour des yeux.»
Stokman souligne qu’avec une lecture de 83%, il est clair que la joie était l’émotion principale du moment pour la jeune femme.
Des experts en biométrie n'ayant pas participé à l’expérience ont déclaré que les résultats étaient fort intéressants, même si leur valeur scientifique reste à démontrer.
«La technologie de reconnaissance du visage évolue rapidement, mais la reconnaissance des émotions est toujours au stade embryonnaire», précise Larry Hornak, directeur du Centre des technologies de l’identification à l’Université de West Virginia.
«Ils semblent tout de même s’être servis d’un jeu de données, aussi petit soit-il, ce qui est typique du travail réalisé dans un domaine relativement nouveau comme celui-ci. C’est un résultat intéressant», conclut-il.
Stokman est conscient que l’expérience de l’Université d’Amsterdam n’étaiera ni ne réfutera pas les théories controversées dont a fait l’objet la peinture du maître florentin. L’une de celles-ci avance que la toile est en fait un autoportrait de Leonardo en femme.
«Qui sait, peut-être que d’ici 30, 40 ou 50 ans, nous serons en mesure de dire ce que ressentait cette femme» évoque Stokman.
Hornak trouve l’idée fort intéressante. «Il est toujours amusant de mettre en pratique des technologies dans des domaines d’intérêt public, et parfois les résultats peuvent être tout à fait illuminants» dit-il. Jim Wayman, un chercheur en biométrie de l’Université d’État de San Jose, abonde en ce sens.
«C’est plus abracadabrant que scientifique, dit-il, mais cela divertit et ne fait de mal à personne.»
source : canoe sciences et tech
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