jeudi, septembre 08, 2005
Pierre Bensusan Altiplanos - 2005
VAvec Altiplanos, Pierre Bensusan confirme ce que le précédent (Intuite) montra admirablement : La guitare possède des possibilités insoupçonnées...
Deux chansons particulièrement réussies , dont une adaptation du très célèbre poème « Demain dès l’aube... » de Victor Hugo, constituent deux coupures, deux poses ( plages 5 et 11 ) au sein de cet album essentiellement instrumental. Ce sont de longues mélodies qui ondulent doucement , bien mises en valeur par la guitare qui, là, recherche l’efficacité discrète.
On y trouve aussi trois pièces créées pour le spectacle « Le Serpent d'Etoiles » présenté au Planétarium de Poitiers ( pour plus d’info ). Pierre Bensusan y est en compagnie de Michel Benita ( basse, claviers), Blaise Boutlefeu ( percussions diverses ) et bien sûr son compère Didier Malherbe qui utilise ici un instrument à vent Arménien, le doudouk ... Ces trois parties « orchestrées », disposés aux plages 3, 10 et 13, constituent en quelques sortes des intermèdes.
Les neufs plages restantes sont des compositions pour guitare seule mais il y a quelque chose de plus qu’avec Intuite. L’influence de grands noms du vingtième siècle ( Debussy, Stravinsky, Varèse, etc... ) se fait parfois sentir et surtout, l’écriture plus moderne semble se libérer des contraintes liées aux « styles ». L’Irlande est toujours là, comme au début, mais ce n’est plus un île, c’est un bateau qui visite le vaste monde et, bien sûr, Pierre Bensusan est à la barre...
L’album s’ouvre sur « Sentimentales Pyromaniaques » , invitation à la danse discrètement chaloupée, oscillant entre l’Irlande, l’Afrique du sud et les caraïbes. Les autres morceaux possèdent aussi cette puissance évocatrice propre à Pierre Bensusan et une grande liberté mélodique : les compositions mûries et structurées conservent la fraîcheur d'une improvisation. On retrouve tout particulièrement cela dans « La Dame de Clevedon », très belle ballade Celtico-Jazzy-impressionniste , dans « Altiplanos » , fort bel hommage à Ingrid Betancourt , dans « Hymn 11 » qui fait penser à une libre improvisation pleine d’émotion et de retenue sur une grille de de type « ballade Irlandaise » et enfin « Chant de Nuit » qui semble, sans le citer clairement, revisiter le très beau thème de « Si Bhig Si Mhor » ( Album « Musique » )
Bien sûr, et c’est aussi une caractéristique forte de l’auteur, on découvre des métissages convaincants et surprenant à la fois, comme dans « Scarabée » jazz-blues-celtique , dans « Nefertari » avec de belles couleurs brésiliennes et surtout dans « Falafel à Montségur », véritable kaléidoscope qui relie l’Afrique noire, le moyen-orient, l’Amérique du sud et l’Europe. A cette occasion Pierre siffle et fredonne pour compléter ce paysage sonore fastueux ; un régal ! Il est seul avec une guitare mais transmet un « groove » stupéfiant, comme si une excellente section rythmique le soutenait.
Enfin, au cœur de l’album, « If Only You Knew » surprend. Même après plusieurs écoutes, c’est la sensation initiale qui revient : C’est l’arrangement brillant d’un thème immortel bien connu des amateurs de soul et de blues. Le titre va dans cette direction et pourtant, finalement non ... les indications portées sur le disque l’auraient signalé... Ainsi, tout y est ... sauf l’antériorité effective du thème. Magistral !
Ce musicien hors norme continue donc à mûrir, à évoluer, à explorer sans fin. Il parvient désormais, sans « coq à l’âne » , sans citations, sans clichés ni « tics de langage », à nous donner à entendre des pièces inspirées et « charnelles » qui nous laissent entrevoir un univers intérieur plein de vie et de couleurs. Son jeu, bien que techniquement redoutable , semble apaisé, comme s’il ne s’agissait que de rêveries improvisées. Le tour de force est d’autant plus admirable qu’il y parvient tout en conservant à l’ensemble un côté naturel, intuitif et spontané.
source : la guitare com Hubert Bayet
- Le site web de Pierre Bensusan
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